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Vivre ensemble, parce que ... différents !

Intervention lors de la table ronde : Pourquoi est-il vital pour nos sociétés d'apprendre ou de réapprendre à vivre ensemble ?

CeracJ -  Mars 2016 - Mairie de Saint Mandé.

 

Le vivre ensemble est le concept à la mode qu’il suffit de brandir pour obtenir un consensus social parmi les « Ã¢mes bienpensantes Â».

L’idée est belle et paraît simple lorsque l’on ne se pose pas la question des conditions de sa mise en œuvre.

 

Par ailleurs, la problématique semble nouvelle, parce qu’elle se présente sous un jour nouveau, du fait de flux migratoires. Mais, c’est en fait, la question clé de la cohésion sociale qui se pose à chaque société.

 

 

  • Comment faire un tout lorsqu’on est la réunion d’individualités différentes, dans leurs cultures, dans leurs codes, leurs valeurs,

  • leurs conceptions du monde, leurs croyances aussi ?

  • Comment fonder le groupe avec des « ego Â» individualistes ?

  • Comment participer à un groupe sans se fondre dans ce groupe, sans perdre sa richesse personnelle, son originalité ?

 

La tradition juive nous enseigne que le Créateur s’appelle « Chalom Â», c’est-à-dire « Paix Â», parce qu’Il passe son temps à rechercher l’équilibre entre les opposés que sont la « lumière Â» et « l’obscurité Â»(1). Les deux, en s’unissant sans se confondre, constituent ce que l’on appelle un « jour Â» constitué d’une période diurne et d’une période nocturne. Mais, il ne suffit pas pour faire un tout de juxtaposer des contraires ou des différents.

 

Certes, il est fondamental, voire indispensable que chacun ait son espace propre pour exister en tant que tel, par différence d’avec les autres.

Dans le cas contraire, on aurait un monde de clones, sans grande richesse. Cette richesse se construit grâce à la différence, grâce à la confrontation, dans un esprit d’échange. Si je n’existe que pour moi, je vis dans un monde clos qui ne me permet pas de progresser, d’avancer vers l’exploitation de ma potentialité. Je reste dans un espace mortifère. C’est la rencontre qui me permet de découvrir une manière différente de vivre, de penser, d’aborder le monde. Cette différence questionne mes certitudes, non pour les fragiliser, mais pour les renforcer dans ce qu’elles ont de positif et les amender dans ce qu’elles ont de négatif, de non abouti.

 

La rencontre me permet de dépasser mes certitudes non réfléchies, non fondées en conceptions mûries ou de les faire évoluer.

Cette confrontation n’exclut pas une prise de risque. Toute rencontre véritable déstabilise mon être dans sa suffisance.

Il propose une vision différente du monde fondée sur d’autres principes, d’autres traditions, d’autres réflexions.

Mais, pour que la rencontre puisse se faire, il faut que je laisse de la place à l’autre, sans me néantiser moi-même.

Mon originalité n’est pas exclusive de celle de l’autre et vice versa. C’est la suite de l’action divine. Entre le temps de la lumière et celui de l’obscurité, D-ieu a ménagé des zones d’échanges et de partage, des zones de transition. À l’aube, la lumière grandissante emprunte un peu de l’obscurité et au crépuscule, c’est l’inverse.

 

Ces deux périodes d’échanges produisent les aubes porteuses d’espoir et des crépuscules colorés comme on n’en voit jamais, ni tout au long du jour, ni durant la nuit.

 

Les deux temps existent : celui du soi et celui du partage. Les deux, s’ils devenaient exclusifs seraient stériles.

 

Le vivre ensemble, tout en étant différent, ne peut nous enrichir que parce qu’à certains moments, nous sommes, nous-mêmes, et que nous avons, comme l’autre, quelque chose à lui apporter. Cela doit être intégré aux apprentissages. Le savoir ne suffit pas pour faire évoluer des comportements. C’est d’un vrai travail sur le savoir être qu’il s’agit d’instaurer. Mais, bien souvent, le développement d’une éducation de groupe, d’une éducation identitaire se réalise sur la critique et le rejet de l’autre. Il est plus facile de se construire face à un concurrent que face à un différend acceptable et respectable(2).

 

C’est ce défi du partage et de l’échange qu’il faut relever durant la scolarité pour être en mesure de le vivre à l’âge adulte.

Cette paix résultant de l’association des différents n’est jamais atteinte ; c’est l’objectif dynamique vers lequel on doit tendre.

 

Croire qu’on l’a atteint, une fois pour toute, c’est le meilleur moyen pour le perdre.

Sachons, chaque jour, construire un peu de vivre ensemble pour s’enrichir mutuellement et rester dans une aspiration positive.

 

___________

 

Notes :

 

(1) Isaïe 45,7 : « Je forme la lumière et crée les ténèbres, j’établis la paix Â».

(2) cf à ce sujet « Ã‰ducation identitaire et tolérance Â» in « L’Éveilleur des Esprits Â» - Biblieurope, 2001, page 28.

 

 

Colloque Éthico-Juridique : Étrangers en terre de France. Pourquoi et comment les intégrer ?

organisée par le CeracJ le 21 mars 2016 à la Mairie de Saint Mandé.

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