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Les trois temps de l'étude de la Loi Juive

Préface du libre « Les mains propres » ou Les ablutions des mains dans le Judaïsme

du Rabbin Jacky Milewski, Editions Biblieurope / FSJU, collection L’âme de la Loi, Paris 2007.

 

 

Dans l’étude et l’enseignement de la loi juive, on peut envisager trois entrées différentes

qui correspondent chacune, non seulement à des démarches différentes, mais également

à des temps distincts. Il y a l’entrée par la règle d’application de la loi, celle par l’histoire

de la constitution de la règle et enfin, celle par le message porté par la règle.

 

La plus répandue de ces trois démarches est certainement la première. Il est alors convenu

de parler de « Dinim » ; ce sont les « règles », au singulier, on dirait en français, le droit.

Son code, par excellence, c’est le « Choul’han Aroukh », la table dressée, rédigé par Rabbi

Joseph Caro au XVIe siècle. Il s’agit d’un recueil de lois et de prescriptions présentées de

manière brève et succincte.

Pour faciliter l’accès du public, on en a rédigé des Abrégés où l’on peut retrouver facilement, la règle du droit qui nous échappe.

C’est là, le premier accès à la loi qui nous permet d’apprendre quel est le comportement souhaitable et celui qui ne l’est pas.

Sa forme est avant tout informative et il est bon de commencer par cette entrée avec les jeunes enfants.

C’est pour l’adulte, le moyen de se remémorer ce qu’il a appris auparavant.

 

Chronologiquement, on devrait ensuite passer à la deuxième démarche : celle de la « ‘Halakha », littéralement, celle de la « marche », c’est-à-dire, celle de la loi qui n’en finit pas de se constituer. La loi a une histoire : celle du passage du verset biblique, de la discussion talmudique qui débouche sur la formulation du code avant d’être ré-interrogée pour répondre aux questions de temps et d’époques changeantes. Son fondement reste immuable. Il se rattache à la révélation du Sinaï, mais sa formulation s’adapte aux questions ou aux contextes qui émergent au cours du temps. S’il fallait citer un texte, on se réfèrerait plutôt à l’un des ancêtres du « Choul’han Aroukh »,

à savoir les « Arbaa Tourim », les « quatre colonnes », rédigé par Rabbi Jacob ben Acher au XIVe siècle.

Il rapporte, en effet, les discussions talmudiques qui sont la source des décisions juridiques menant au code ultérieur.

On pourrait également évoquer les multiples recueils de « questions-réponses » où des décisionnaires répondent à des questions de leurs temps en se référant aux sources bibliques et talmudiques. Il s’agit dans cette approche de s’introduire dans le laboratoire d’élaboration de la règle. Celle-ci n’a, en effet, rien d’arbitraire. Elle répond, notamment, à des principes de déductions logiques et des procédures de prises de décisions. Ceci permet d’échapper au sentiment d’arbitraire que l’on pourrait avoir en ne restant que dans la démarche précédente.

 

La troisième démarche s’intéresse aux enseignements moraux et philosophiques portés par la règle.

C’est ce que l’on appelle communément, les « Ta’amei Hamitsvot », ce que l’on traduit habituellement par les « raisons des commandements ». Or, la notion de « Ta’am » évoque plutôt le « goût », c’est-à-dire, ce qui exprime la richesse gustative d’un aliment, ici, la richesse de signifiance du commandement. En d’autres termes, l’étude du message porté par le commandement.

Les actes ne sont pas une fin en soi. Les règles n’ont pas qu’une fonction utilitaire pour organiser la vie en société ou pour se souvenir des faits du passé. Tous les actes rituels et répondant au code social juif sont les porteurs d’un message spirituel qui doit élever l’homme au-dessus de sa nature humaine pour en faire un être capable de dialoguer avec le Créateur. L’accès à ce troisième niveau d’étude de la loi permet de prendre conscience de son épaisseur, de sa résonance, de sa valeur symbolique. Tout ceci, n’épuise pas la justification des règles qui échappent parfois à l’homme, mais permet d’associer une intention à l’action.

 

Si le premier niveau doit permettre au jeune d’accéder à la majorité religieuse avec des habitudes comportementales ancrées dans la connaissance, il faut accompagner l’adolescent à travers le laboratoire d’élaboration de la Loi, afin de lui faire toucher du doigt,

les logiques en action. Proche de l’âge adulte, il faudra commencer à lui faire découvrir les messages contenus dans les règles pour lui permettre d’accéder à un Judaïsme responsable qui soit une source d’enrichissement perpétuel.

 

C’est dans cette troisième voie que s’inscrit le travail du Rabbin Jacky Milewski. Ce faisant, il comble un vide dans l’édition française et permet l’accès du plus grand nombre à une réelle maturité dans l’étude de la législation hébraïque. Il nous fait découvrir au-delà du corps de la loi, son âme.

 

Par une large érudition et une présentation claire, il s’adresse à tout un chacun. Souhaitons à son entreprise, une pleine réussite et de participer au développement des études juives en France.

 

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